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Melilia: Renforcement du dispositif sécuritaire espagnol

Alors que les autorités locales de Melilia renforcent leur dispositif sécuritaire, côté marocain rien n'est encore fait. Le drame des Marocains qui traversent la frontière continue.

Bien que le calme soit de nouveau de retour sur la frontière entre le Maroc et Melilia, la partie espagnole persiste et signe : il est temps de mettre fin aux affrontements. Réunis depuis quelques jours, les représentants du gouvernement autonome de la ville, timidement revendiquée par le Maroc, et des forces locales de sécurité, réunis au niveau de trois syndicats, tentent de trouver des solutions au flux massif des Marocains qui traversent la frontière et aux débordements et incidents qui vont avec. L'agression à l'arme blanche dont a fait l'objet un élément des forces de l'ordre espagnoles, jeudi dernier, est dans tous les esprits. Tout comme le décès d'une femme marocaine, en novembre dernier, littéralement sous les pieds des nombreuses personnes qui traversaient en même temps un poste-frontière des plus fréquentés (34 millions de personnes par an).

A défaut d'une coordination avec les autorités marocaines, la réponse espagnole se veut désormais sécuritaire. Parmi les mesures préconisées et d'ores et déjà en chantier, le déplacement du poste-frontière de Béni Ansar à Barrio Chino (le Quartier Chinois) plus à l'intérieur de la ville. En attendant, une unité de veille sur l'évolution du flux a été installée.

Mais, de l'aveu même des autorités espagnoles, rien ne dit que ces mesures limiteront des dégâts humains et des affrontements désormais quotidiens. «Et une coopération étroite avec les autorités marocaines s'impose aujourd'hui et plus que jamais, dans le sens de fluidifier les passages, mais aussi les humaniser. Et pour cause, les tristes événements dont Béni Ansar est le théâtre sont également de la responsabilité du Maroc», dit ce député de Nador. Côté officiels marocains, le silence radio est de mise. «Or, le fonds du problème se situe de notre côté. Il n 'est autre que la corruption», déclare Chakib Khyari, militant associatif à Nador. Si bon nombre de ceux et celles qui traversent la frontière font de la contrebande, d'autres n'ont d'autre but que leurs courses et autres approvisionnements personnels. «Tous font l'objet d'un véritable racket de la part des éléments des forces de sécurité et des douanes présents sur la frontière, puisqu'ils ont le choix entre payer en échange de leur libre passage au Maroc ou de se voir plumés de leur bien», explique le président de l'Association du Rif pour le développement.

L'astuce est toute trouvée pour mettre la pression : maintenir le plus grand nombre de Marocains de l'autre côté de la frontière, pour forcer la partie espagnole à les évacuer de force. Ce qui explique également les grands mouvements de foule et les avalanches humaines sur la frontière, avec tous les incidents et autres drames auxquels ils donnent lieu. Sauver sa peau au plus vite revient à payer sans piper mot.

«Les Espagnols, et pour éviter tout soupçon et autres tentations de maltraitance, ont installé des caméras sur leurs frontières. Toute la question est de savoir pourquoi les Marocains ne s'y mettent pas», ajoute ce militant rifain. Un retard «technologique» qui n'a d'égal que les efforts entrepris par les Espagnols suite aux manifestations qui avaient eu lieu l'année dernière pour protester contre cet état des lieux et les traitements inhumains auxquels les Marocains sont soumis au moment de franchir la frontière. «Auparavant, les éléments de la police et de la gendarmerie espagnols exigeaient souvent des visas aux habitants de Nador, alors que la loi les autorise à traverser la frontière avec leurs simples passeports. Désormais, cette question est réglée. Tout comme l'usage de la force, qui avait souvent des allures de violence raciste, a disparu, grâce notamment à l'installation de caméras», explique Khyari.

Des voix espagnoles vont plus loin, allant jusqu'à contester l'existence même de ces frontières. Parmi elles, celle du journaliste Ignacio Cembrero pour qui ces frontières sont «une honte». Et de citer à ce titre les dizaines de blessés, parfois même des morts, parmi les Marocains qui font du trabendo. «En plus, il est de notoriété publique que ceux qui les traversent sont parfois frappés et souvent obligés de corrompre les fonctionnaires de la douane. Sans parler des longues heures d'attente avant de pouvoir rentrer ou sortir du Maroc. A cela s'ajoute le fait que depuis septembre, les forces de sécurité espagnoles et marocaines en sont venues trois fois aux mains sur cette frontière», nous dit-il.

Tarik Qattab
Source: Le Soir Echos

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