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Fin de la trêve diplomatique du Maroc vis à vis de l'Algérie

Après avoir observé unilatéralement une trêve d’une année, la diplomatie marocaine semble avoir revu sa politique vis à vis du pouvoir algérien.

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Le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita. / DR
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Est-ce la fin de la main tendue du Maroc envers l’Algérie ? C’est du moins ce que laissent transparaitre les dernières déclarations de Nasser Bourita. Le chef de la diplomatie marocaine semble changer son fusil d’épaule ces derniers jours, sachant qu'il y a une année, il s’est interdit d’émettre le moindre commentaire sur la situation en Algérie.

En témoigne la teneur de sa déclaration du 16 mars 2019, dans laquelle il a clairement annoncé la «non-ingérence» du royaume dans les affaires internes du voisin de l’Est. Nasser Bourita avait alors martelé que «le Maroc n’a à se mêler des développements internes que connait l’Algérie». Des déclarations érigées depuis en code de conduite pour l’ensemble des voix officielles au Maroc, contraintes de passer sous silence les marches du Hirak algérien.

De plus, tout dépassement de ces recommandations a été immédiatement sanctionné. Les circonstances de la démission de Salaheddine Mezouar de la présidence de la CGEM est un exemple éloquent. L’ancien ministre des Affaires étrangères sous le gouvernement Benkirane II avait choisi de briser le silence, commentant brièvement la situation en Algérie à l’occasion de sa participation à un forum politique organisé en octobre 2019 à Marrakech. Mezouar avait appelé les militaires algériens à accepter de partager le pouvoir avec le peuple. Une «audace» qu’il a chèrement payée, après la publication d’un communiqué de presse de la diplomatie marocaine, qualifiant ses propos de «démarche irresponsable, maladroite et irréfléchie».

Après une année, la diplomatie marocaine revoit sa politique

Même le chef du gouvernement a dû se plier aux règles imposées par la diplomatie marocaine sur le cas algérien. Ainsi, Saadeddine El Othmani a dû nuancer ses déclarations sur le voisin de l’Est. Le 16 mai, à l’occasion d’un «Iftar» avec des représentants de médias, il avait prédit que «la nouvelle équipe dirigeante en Algérie n’adoptera pas le même comportement hostile vis-à-vis du Maroc», dans une prophétie qui ne s’est pas avérée exacte.

Le lendemain, l’ancien porte-parole du cabinet El Othmani publiait un communiqué assurant que «le chef du gouvernement n’a fait aucune déclaration officielle sur l’Algérie voisine et n’a exprimé aucune position du gouvernement marocain».

Ce code de conduite a été scrupuleusement observé par l’ensemble des acteurs politiques officiels, jusqu’l’arrivée au pouvoir d’Abdelmadjid Tebboune. Depuis, la donne a évolué. Ainsi, le nouveau président a eu le mérite de décliner sa position sur le principal dossier qui concerne le Maroc dès les premières minutes de sa prise de fonction. «Je souligne clairement que la question du Sahara occidental relève d'une question de décolonisation qui est entre les mains des Nations unies et de l'Union africaine», a-t-il précisé, le 19 décembre, dans son discours ayant suivi la cérémonie de sa prestation de serment. Le nouvel homme fort d’Alger a, depuis, multiplié les déclarations dans ce sens, au grand dam du Maroc.

Considérant que sa politique de main tendue n’a rien donné de concret sur le terrain, le royaume semble s’être débarrassé de la réserve qu'il a adoptée durant près de 12 mois. Sa diplomatie n’hésite plus à titiller l’Algérie sur les réactions aux ouvertures de consulats de pays africains à Laâyoune et Dakhla.

Cette nouvelle ligne de conduite est appelée à se poursuivre dans les semaines et les mois à venir sur la question du Sahara occidental, avec les échéances d’avril au Conseil de sécurité, le Sommet Afrique-France de juin ainsi que l’éventuel Sommet Union africaine-Ligue arabe que l’Arabie saoudite doit accueillir. Des empoignades sont ainsi en perspectives entre les deux voisins ennemis.

article_updated 03/03/2020 a las 14h21