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Après l’ambassadeur et les élus, la RTBF exhume le dossier des détenus sahraouis de Gdeim Izik

Six ans après le verdict d’un tribunal civil au Maroc dans le procès de Gdeim Izik, la RTBF exhume ce dossier. Il y a trois semaines, l’ONU a appelé les autorités marocaines à libérer les 13 détenus sahraouis membres de ce groupe.

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La RTBF poursuit ses enquêtes sur le Maroc et ses "amis" en Belgique. Après l’ambassadeur du royaume en Belgique, Mohammed Ameur, et les élus belges défendant la marocanité du Sahara occidental, le média public francophone s’intéresse au dossier des détenus sahraouis de Gdeim Izik, particulièrement aux avocats belges qui ont assisté à la phase du procès, en 2017, devant un tribunal civil, (la Chambre criminelle près la cour d’appel de Salé) en tant que «membres d’une mission d’observation».  Pour rappel, en 2013, les Sahraouis impliqués dans l’assassinat de onze éléments des forces de l’ordre lors du démantèlement du campement de Gdeim Izik près de Laayoune, en novembre 2010, étaient jugés devant le tribunal militaire.            

Six ans après le verdict du 19 juillet 2017, la  RTBF revient sur ce procès en donnant la parole aux avocats-observateurs accusés par le média d’avoir été «achetés par le Maroc». «Je comprends qu’on se pose des questions. Mais le fait d’avoir été payé par le Maroc n’a pas influencé mes observations. Aucune autorité marocaine n’a dicté ma ligne de conduite (…) Nous avons été logés la plupart du temps dans un palace (ndlr : un 5 étoiles réputé à Rabat). Je n’ai pas l’impression d’avoir défendu les intérêts marocains», a déclaré Me. André Martin Karongozi.

De son côté Me. Emmanuel Carlier a défendu le bienfondé de la mission d’observation bien qu’il ait reconnu que les autorités marocaines avaient payé leur séjour au Maroc. «Oui. Mais cela ne doit pas être pris comme moyen pour décrédibiliser notre mission d’observation. Ce procès n’était qu’un reflet de la problématique géopolitique entre le Maroc et l’Algérie sur le dossier du Sahara occidental. Chaque observateur avait ses propres affinités, que ce soit avec le Maroc ou l’Algérie. Il n’y avait aucune indépendance ni dans un camp, ni dans l’autre», a-t-il expliqué.

Ces avocats ont-ils enfreint le code déontologique de la profession ?

Des propos contestés par les avocats belges qui défendaient les détenus sahraouis. «De toute évidence, on n’a pas assisté au même procès. Au moment des déclarations faites par les avocats belges, nous avions déjà dénoncé les aveux obtenus sous la torture (…) En tout cas, ça ne correspond ni à ma réalité, ni à ce qui s’est déroulé dans la salle d’audience», a affirmé l’avocate Ingrid Metton.

La RTBF souligne qu'une membre de la mission des observateurs, l’avocate Sophie Michez, a continué à défendre les positions du royaume en Belgique en prenant part, par exemple en 2019, à des activités de «l’Association des Amis du Maroc» - une ONG que la RTBF a déjà accusée, dans une précédente enquête, de défendre les intérêts du Maroc en Belgique -, et d’assister la même année en sa qualité d’invitée à la fête du trône présidée par le roi Mohammed VI.

Les avocats-observateurs pointés du doigt pour avoir «servi les intérêts du Maroc», ont-ils enfreint le code de déontologie des avocats ?  «Il ne me paraît pas y avoir d’obstacle déontologique à ce qu’un Etat mandate un avocat pour suivre un procès en observateur. Il n’est pas non plus interdit, par principe, à un avocat de s’exprimer dans les médias et d’y faire part du point de vue de son client, pour autant que ce soit à la demande de celui-ci», a précisé Me Geoffroy Cruysmans, chef de cabinet du bâtonnier du Barreau de Bruxelles.

La nouvelle enquête de la RTBF sur le Maroc intervient après l’appel lancé par le groupe de tavail de l'ONU sur les détentions arbitraires aux autorités marocaines «à libérer immédiatement» les 13 sahraouis du groupe Gdeim Izik, emprisonnés depuis 2010. Dans une décision non-contraignante, les experts de l'ONU ont conclu que «plusieurs violations des droits humains avaient été commises à l'encontre des 13 détenus lors des manifestations de Gdeim Izik», organisées entre octobre et novembre 2010 dans le campement de fortune du même nom installé près de Laayoune.