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L'exclusion permanente des homosexuels masculins du don du sang suscite une...
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15 juin 2006 21:18
Le monde, France



Mise en place mercredi 14 juin par l'Organisation mondiale de la santé, la Journée mondiale du don de sang coïncide avec le développement, en France, d'une controverse concernant le maintien ou non de l'exclusion des homosexuels masculins de ce don. Le 11 mai, Jack Lang, député socialiste du Pas-de-Calais, dénonçait en effet, dans une lettre à Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, "une mesure discriminatoire extrêmement choquante". L'ancien ministre de la culture demandait que l'on mette fin à cette mesure, mise en place en 1983.



Dans sa réponse, datée du 17 mai, Xavier Bertrand a exposé les arguments justifiant cette exclusion, notamment les risques de transmission du virus du sida. "L'homosexualité ne constitue bien évidemment pas en soi un critère d'exclusion du don du sang, expliquait le ministre. Il ne s'agit donc pas d'une discrimination vis-à-vis d'une population donnée. (...) Les données épidémiologiques montrent que la prévalence de l'infection à VIH dans la population homosexuelle masculine sexuellement active serait de 12,3 % contre 0,2 % dans la population générale. Ce n'est donc pas le fait d'être homosexuel, mais la pratique de relations sexuelles entre hommes qui constitue une contre-indication au don du sang. D'ailleurs, l'homosexualité féminine n'est pas une contre-indication."


COMPORTEMENTS À RISQUE


Cet échange résume l'incompréhension qui demeure, vingt ans après l'instauration du dépistage des anticorps anti-VIH chez les donneurs de sang, entre les responsables sanitaires et ceux qui s'inquiètent d'une possible stigmatisation des homosexuels. Pour justifier l'exclusion des homosexuels masculins, les responsables de l'Etablissement français du sang (EFS) avancent plusieurs chiffres : 27 % des nouveaux diagnostics d'infection par le virus du sida et 51 % des cas d'infection datant de moins de six mois concernent des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, des proportions bien plus élevées que dans la population générale. "Les relations sexuelles non protégées ont augmenté de 70 % entre 1997 et 2004 chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, ce qui s'accompagne d'une augmentation parallèle de maladies sexuellement transmissibles", ajoute-t-on auprès de l'EFS, tout en expliquant tenir compte de l'émergence dans la communauté homosexuelle d'une maladie émergente - la lymphogranulomateuse vénérienne - et du risque d'apparition de nouveaux virus. On souligne enfin que 35 % des hommes trouvés infectés par le VIH après un don de sang avaient des pratiques homosexuelles.

Ainsi, en dépit de l'amélioration spectaculaire de l'efficacité des techniques de dépistage, les responsables de l'EFS estiment que la contre-indication doit être maintenue, car ces techniques ne permettent pas d'identifier le virus lorsque l'infection est très récente. Alors qu'on estime en France à 10 % la proportion des candidats au don du sang récusés pour diverses raisons après l'entretien préalable au don, la politique suivie par les autorités sanitaires se fonde aussi sur une directive européenne (2004/33/CE). Celle-ci réclame une contre-indication permanente pour les "sujets dont le comportement sexuel les expose à un risque élevé de contracter des maladies infectieuses transmissibles par le sang".

Jack Lang estime que le critère d'exclusion qui devrait être retenu est non pas celui de l'homosexualité mais celui de "comportements à risque", critère déjà adopté par la Suède et le Portugal et qui vaut tant pour les hétérosexuels que pour les homosexuels. Il espère que le prochain réexamen du questionnaire remis à chaque candidat donneur "pourra être une première étape vers l'ouverture au don du sang aux homosexuels".





Chronologie

La liste des marqueurs biologiques des maladies transmissibles par le sang ne cesse de s'allonger depuis soixante ans : syphilis (1947), hépatite B (1971), VIH (1985), HTLV (1989), hépatite C (1990). Depuis peu, de nouvelles techniques permettent d'identifier non plus les anticorps dirigés contre le germe pathogène, mais le génome viral. C'est le cas, depuis 2001, en France, pour le VIH et le virus de l'hépatite virale de type C.




Jean-Yves Nau
Article paru dans l'édition du 15.06.06
 
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