L'organisation du Mondial 2010, un enjeu «national et stratégique» pour le Maroc --par Nicolas Marmié--
AP | 10.05.04 | 18:04
RABAT (AP)-- Le Maroc veut y croire et retient son souffle. Le 15 mai à Genève, la Fédération internationale de football (FIFA) dira le 15 mai si, oui ou non, le royaume sera préféré à son principal rival et favori, l'Afrique du Sud, pour organiser le Mondial 2010. «J'espère que nous sommes parvenus à convaincre la FIFA de l'importance que représente pour nous l'organisation de cet événement» a déclaré à l'Associated Press Nabil Benabdallah, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement marocain. «Les enjeux sont énormes, si le Maroc est désigné et propulsé sur le devant de la scène mondiale, cela marquera un formidable coup de pouce pour notre développement économique et social et la reconnaissance de notre processus de démocratisation», estime le ministre. De fait, après trois candidatures malheureuses (1994, 1998 et 2006), le Maroc joue samedi sa dernière carte pour l'organisation d'un Mondial, qui ne devrait pas revenir sur le continent africain avant au moins une vingtaine d'années. Partenaire politique et commercial de référence de l'Union européenne, et de la France en particulier, dans un Maghreb désuni, le Maroc espère aussi retirer les dividendes de son statut de «pays modèle» dans le monde arabo-musulman, selon les critères édictés par les Etats-Unis, autre allié historique du royaume chérifien. «En cette période de vive tension internationale et d'ébullition du Proche-Orient», le Maroc a deux options, analyse, sous couvert d'anonymat, un diplomate européen à Rabat. «Soit il relève le défi de la modernité et de la mondialisation, dont le Mondial 2010 pourrait être un puissant catalyseur. Soit, marginalisé par l'élargissement de l'UE et pris en tenaille par ses alliances occidentales et son appartenance au monde musulman, il se laisse rattraper par l'immobilisme, avec son corollaire politique: le fondamentalisme religieux accompagné d'une immigration clandestine massive». Engagé depuis la fin des années 90 dans un processus de démocratisation (liberté d'expression, droits des femmes, pluralisme politique, réforme du champ religieux), le Maroc a également engagé un ambitieux chantier de libéralisation économique (privatisations, démantèlement douanier) qui aurait tout à gagner de «l'effet 2010». L'UE, premier partenaire commercial d'un royaume qui se compare à «la Californie de l'Europe» et aspire à devenir une plate-forme industrielle régionale, serait l'un des principaux bénéficiaires d'une victoire marocaine. L'Espagne, mais également la France et l'Italie, dont les entreprises devraient largement participer aux chantiers d'infrastructure (hôtellerie, réseaux ferroviaires et autoroutiers, informatique) de Maroc 2010, ont ainsi officiellement appuyé la candidature marocaine. Paris et Rome ont en outre conjointement invité la Russie à soutenir le projet marocain. Cette candidature présente enfin pour Rabat l'intérêt de s'inscrire dans une autre «priorité stratégique» engagée en 2000, le développement du tourisme, visant à porter à 10 millions le nombre de visiteurs au Maroc d'ici... 2010. Un objectif qui devrait être largement atteint en cas de victoire marocaine, des dizaines milliers d'Espagnols, Portugais, Français et Italiens étant attendus pour remplir les stades, aux côtés des supporters marocains, grands passionnés de football. Tout cela explique le soin apporté à la confection de ce quatrième dossier de candidature qui pourrait générer, selon Rabat, la création de quelque 400.000 emplois. «Nous ne pouvons pas le dire officiellement, mais c'est une évidence: la candidature marocaine dépasse largement les enjeux sportifs, ou même économiques. Nos partenaires et amis doivent comprendre qu'il s'agit de nos intérêts communs», résume un ministre marocain. AP
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