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13 ème anniversaire : Tchétchénie 1991
M
12 septembre 2004 21:00
Étrange personne dans le monde n'a célébré le 13 ème anniversaire du siège de GROZNY en 1991. Les bombardements terroristes russes ont fait 100 000 morts parmi les civils.

Le SANG musulman n'a aucune valeur ces temps ci....... Et l'hypocrisie des USA et de ses alliés est flagrente.

b
12 septembre 2004 21:36
tjrs la meme chanson victimiste. et comme si on avait l'habitude de celebrer un 13 anniversaire ! et les hutu et tutsi monsieur, c'est quel anniversaire ? ce n'est pas des musulmans je sais ..

voici un article a lire. ca pourait peut-etre vous ouvrir un peu les yeux sur les choses qu'on ne vous dit pas. il est d'ailleurs une critique adressee en premier lieu aux journalistes occidentaux tiens .

source: politique internationale

[www.politiqueinternationale.com]

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LA RUSSIE FACE AU 3e DJIHAD


Bien qu'elle fût sans doute la plus spectaculaire, l'action terroriste contre le théâtre de Moscou n'était ni la première du genre ni la plus meurtrière.

En novembre 1991, quelques jours seulement après la proclamation de l'indépendance de la Tchétchénie, un commando tchétchène avait détourné un avion de ligne russe. De retour à Grozny, les terroristes, parmi lesquels figurait un certain Chamil Bassaëv, avaient été acclamés par la foule. En 1995, après la prise d'otages de Boudennovsk qui se solda par 150 victimes civiles, Bassaëv devint l'ennemi public N° 1 de la Russie. Loin de ternir son image, ce bain de sang ne fit qu'accroître sa popularité auprès des siens : en janvier 1997, il arriva en deuxième position aux élections présidentielles tchétchènes, obtenant un quart des suffrages. Converti à l'islamisme radical, il demeure une figure emblématique de la cause tchétchène.

La prise d'otages de Moscou n'était pas, non plus, l'attentat le plus sanglant. En septembre 1999, plus de 200 personnes ont trouvé la mort dans des explosions à Moscou et à Volgodonsk. Certains observateurs occidentaux y ont vu la main des services spéciaux russes qui auraient trouvé là un prétexte pour envahir la Tchétchénie et faciliter l'ascension politique de Vladimir Poutine. Bien que les coupables n'aient jamais été identifiés, les autorités et l'opinion publique russes n'ont évidemment pas la même analyse. La paternité de ces actes barbares a été attribuée à des islamistes tchétchènes qui auraient voulu venger la défaite que l'armée fédérale leur avait infligée au Daghestan en août 1999. Les explosions de 1999 se situent, en effet, dans le droit fil des actions terroristes qui, de 1993 à 1999, ont frappé le Daghestan, les territoires de Stavropol et de Krasnodar, la Région de Rostov, l'Ossétie du Nord et la Kabardino-Balkarie. Ces attentats à la bombe, détournements d'avions ou d'autocars et autres prises d'otages avaient, pour la plupart, été revendiqués par des indépendantistes tchétchènes ou des militants " wahhabites " acquis à leur cause.

Mais, en octobre 2002, pour la première fois, les terroristes ont agi sous la bannière du djihad. Pour la première fois, les images de ces islamistes prêts à mourir plutôt que de plier devant une " puissance infidèle " ont été diffusées dans le monde entier. Pour la première fois, par le biais d'un enregistrement audio, Oussama Ben Laden s'est félicité de l'action du commando, confirmant ainsi l'existence de liens idéologiques entre Al-Qaïda et la résistance tchétchène.

Emus par les images des civils tchétchènes massacrés par l'armée russe, les Occidentaux ont préféré ignorer cette " islamisation " de la lutte de libération nationale. A l'évidence, les exactions (ratissages systématiques, violations des droits de l'homme, arrestations arbitraires, exécutions sommaires de civils) doivent être condamnées - qu'elles soient ponctuelles ou qu'elles soient perpétrées sur une grande échelle. Mais les indépendantistes ne sont pas en reste, et les atrocités commises dans les rangs tchétchènes méritent d'être dénoncées avec la même fermeté : exécutions systématiques des prisonniers de guerre, attentats à la bombe contre des civils (le dernier date de mai 2002, au Daghestan), enlèvements de journalistes, actes de torture sur des otages, russes et étrangers.

La simple énumération de ces violences montre que les deux parties sont désormais engagées dans une stratégie jusqu'au-boutiste, où la force prime sur toute tentative de dialogue. Tous ceux qui veulent sortir de cette impasse et trouver une issue politique au conflit doivent s'efforcer de comprendre les raisons profondes de la radicalisation actuelle.



Les racines du mal



Les médias occidentaux expliquent généralement cette radicalisation par une réaction presque naturelle au durcissement de l'armée fédérale, qui fait de moins en moins la différence entre les rebelles et les civils. Il est vrai que les Russes ont abandonné à la guérilla une large portion de territoire, située au sud-est de la république. Dans cette zone, les fédéraux ne contrôlent que les routes principales, et même sur ces routes ils sont en permanence harcelés par les rebelles. Après chaque attaque, les combattants tchétchènes se fondent dans la population civile qui devient alors la cible d'une répression systématique et féroce.

Mais l'âpreté de la répression russe n'explique pas tout. Si le passage d'un nationalisme exacerbé à un islamisme radical et conquérant s'est opéré aussi vite et aussi facilement, c'est que les germes de cette radicalisation étaient déjà présents dans l'histoire du conflit russo-tchétchène.

Ce conflit n'a, en fait, jamais cessé depuis la guerre du Caucase au début du XIXe siècle. Il a atteint son point d'orgue en 1942, pendant la Deuxième Guerre mondiale, lorsque les rebelles tchétchènes s'attaquèrent violemment non seulement à des unités de l'armée soviétique mais aussi à des civils russes, qui furent massacrés de sang-froid.

La collaboration de la guérilla tchétchène avec les nazis, suivie par la déportation de la population par Staline demeure un épisode largement méconnu et, encore de nos jours, délicat à traiter. Bien que la Tchétchénie fût située à bonne distance de la zone des combats entre la Wehrmacht et l'Armée rouge, les dirigeants nazis ravitaillèrent abondamment les rebelles tchétchènes, l'objectif étant de créer un second front pour disperser l'effort militaire russe .

Depuis la Perestroïka, l'ouverture des archives soviétiques a permis d'éclairer ce chapitre douloureux de l'histoire russo-tchétchène. La victoire péniblement acquise des Russes sur les Finlandais en 1939-1940 avait encouragé les Tchétchènes à s'émanciper de la tutelle moscovite. Les rebelles liquidèrent systématiquement les représentants du pouvoir et les notables. Des médecins et des instituteurs furent pendus. L'invasion du territoire russe par la Wehrmacht, en juin 1941, amplifia la rébellion tchétchène au point que Moscou fut obligé d'envoyer des renforts pour empêcher l'extension du conflit. A partir de 1942, la guérilla bénéficia d'un soutien logistique accru de la part des nazis.

L'état-major allemand cherchait à promouvoir la création d'un Etat tchétchène satellisé en échange de son soutien dans la lutte armée contre le bolchevisme. Les pourparlers avec les émissaires tchétchènes conduisirent à la mise en place d'un pont aérien approvisionnant en armes et en munitions les nouveaux alliés d'Hitler. Ce dernier caressait l'espoir de soulever l'ensemble des musulmans caucasiens contre les Soviétiques.

Les liens germano-tchétchènes se resserrèrent lors de la bataille de Stalingrad. Ainsi, un "gouvernement tchétchène rebelle" n'hésita pas à souhaiter la bienvenue aux soldats nazis, au nom des peuples caucasiens. La progression de la Wehrmacht au cours de l'été 1942 alla de pair avec l'intensification des combats dans les montagnes de Tchétchénie.

En 1942, une organisation clandestine régionale - le Parti spécial des frères caucasiens - vit le jour. Au cours de son " congrès " constitutif, les rebelles déclarèrent représenter onze peuples caucasiens, désireux de " créer au Caucase un Etat sous mandat de l'Empire allemand ". Dans leur programme d'inspiration nationaliste (leur mot d'ordre était : " Le Caucase aux Caucasiens "winking smiley, les " frères " proposaient de " déporter les Russes et les Juifs " du Caucase. En écho, des tracts nazis annonçaient : " Nous avançons et vous apportons la liberté et une vie meilleure, digne de vous, Caucasiens épris de liberté ! Vive le Caucase libre ! ".

Au Nord-Caucase, Hitler décida de jouer de plus en plus la carte musulmane, ordonnant la réouverture des mosquées. La Wehrmacht mit sur pied des unités musulmanes composées de volontaires qui combattirent aux côtés des Allemands tout au long de la guerre. Les mollahs collaborationnistes consacrèrent leur attachement aux nazis en proclamant Hitler " grand imam du Caucase ". Le journal islamique Gazawat (" guerre sainte contre les Infidèles "winking smiley, publié dans le Nord-Caucase occupé, lançait des appels virulents au djihad et à l'extermination des " colonisateurs russes ". Son épigraphe était, du reste, sans ambiguïté : " Allah est au-dessus de nous, Hitler est à nos côtés " .

Les Tchétchènes payèrent leurs sympathies pro-nazies au prix fort : à partir du 23 février 1944, Staline ordonna la déportation de la totalité de la population tchétchène et ingouche vers le Kazakhstan et l'Asie centrale, condamnant ainsi tout un peuple pour les fautes de quelques milliers d'individus, coupables d'avoir pactisé avec l'ennemi.

Jusqu'à ce jour, l'intelligentsia tchétchène n'a voulu retenir de ces années de guerre que le dénouement tragique de la déportation, refusant de procéder au nécessaire examen de conscience qu'appelait cette page peu glorieuse de son histoire. Elle ne s'est pas privée, en revanche, d'exploiter les souffrances du peuple tchétchène (qu'il ne fut pas seul à endurer, tous les peuples de l'ex-Union soviétique ayant payé un lourd tribut à la guerre et au communisme) pour alimenter un nationalisme violemment antirusse.



Du nationalisme à l'islamisme



Après le retour des Tchétchènes de leur exil kazakhstanais, les relations russo-tchétchènes n'ont cessé de se dégrader, notamment au niveau local. En pleine époque soviétique, les manifestations de xénophobie et l'exacerbation des sentiments religieux ont constitué les signes avant-coureurs du conflit à venir.



La montée du nationalisme



Des actes particulièrement barbares, mis sur le compte de l'extrémisme religieux, ont commencé à être signalés. Au cours des années 1980, par exemple, plusieurs tombes de femmes d'origine non tchétchène mariées à des Tchétchènes ont été profanées. En 1981, à Kourtchaloï (District de Chali), un groupe de fondamentalistes a déterré dans un cimetière musulman le corps d'une femme juive, qui avait épousé un Tchétchène. Son cadavre fut brûlé, ses cendres dispersées dans un champ, sans que cela suscite la moindre réprobation de la part des villageois. De nombreux autres " faits divers " de ce genre ont été rapportés en Tchétchénie-Ingouchie.

La montée des tensions entre les deux communautés avait conduit un grand nombre de Russes à faire leurs bagages dès les années 1960. Ces départs se sont multipliés en 1991, après l'arrivée de Djokhar Doudaëv au pouvoir.

De 1991 à 1999, plus de 250 000 Russes ont quitté la Tchétchénie. Parmi les raisons de cet exode, on évoque généralement l'insécurité croissante et la crise économique suite au blocus imposé par Moscou. En réalité, le facteur essentiel fut la montée rapide du nationalisme antirusse dans la Tchétchénie de Doudaëv, événement sans doute jugé trop peu médiatique par la presse occidentale pour être souligné. Des slogans du genre " Russes, ne partez pas, nous avons besoin d'esclaves ! " apparaissaient régulièrement sur les murs des maisons de Grozny. Ils restaient exposés des mois durant sans que ni les autorités ni la population tchétchènes ne réagissent.

Entre 1991 et 1994, Grozny devint une ville sans loi, livrée à l'anarchie, dans laquelle les minorités russes et arméniennes étaient persécutées. Une rescapée raconte : " Des habitants de Grozny ont été brûlés vifs pour la seule raison qu'ils étaient russes... On nous brûlait vifs dans les maisons ; sous les yeux d'une mère, on violait sa fille, on lui coupait les oreilles... On ne sait pas combien de personnes ont été tuées. Nous ne pouvions pas les arrêter. On brûlait nos voisins ; et nous savions que, le lendemain, ce serait notre tour ". De nombreux témoignages de ce genre, provenant de sources différentes, ont été relatés. Les lettres adressées à la presse par les non-Tchétchènes de Grozny ou les procès-verbaux des plaintes déposées à la police sont remplis de récits de viols, de rapts, de meurtres, de captations de biens, sans compter les innombrables violences commises à leur égard ou contre leurs proches par des bandes de jeunes Tchétchènes armés agissant en plein jour.



L'antisémitisme tchétchène



Les Russes ne furent pas les seuls à subir les conséquences de la montée du nationalisme tchétchène. En septembre 1991, le recteur de l'Université de Grozny, d'origine juive, fut enlevé et exécuté le jour même où le général Doudaëv prenait ses fonctions. Cet événement fut interprété comme un avertissement lancé à la communauté juive de Tchétchénie. L'agence israélienne Sokhnout organisa alors en urgence l'évacuation vers Israël de tous ceux qui voulaient partir. En août 1993, il restait à Grozny une vingtaine de Juifs contre 2 600 en 1989 .

Le premier président tchétchène, qui se présentait comme l'un des opposants les plus résolus à l'Empire et au nationalisme russes, ne prenait même pas la peine de dissimuler ses sentiments antisémites. Dès 1992, il dévoilait dans les colonnes d'un journal palestinien un plan visant à détruire l'Etat d'Israël. En mars 1994, dans un entretien accordé au Monde, l'un des historiens qui fait autorité en matière d'antisémitisme, Léon Poliakov, déclarait qu'il était encore trop tôt pour crier victoire. " La seule chose qui aujourd'hui me paraisse certaine, remarquait-il, en ce qui concerne l'antisémitisme et le racisme, en Russie comme ailleurs, c'est que tout cela va continuer ".

En effet, ce type de dérapage va bien au-delà d'une simple manifestation de sympathie envers la cause palestinienne. Le recours à la violence, qu'elle soit verbale ou matérielle, a toujours été une constante de la politique de Doudaëv, et cela bien avant l'intervention armée de Moscou en 1994.

Deux ans plus tôt, Djokhar Doudaëv dénonçait l'action de l'ONU, qualifiant l'organisme d'" invention de Staline et de son bureau politique ". Mieux : il n'a pas hésité à menacer la Russie d'actes terroristes, tout en réitérant ses appels en direction des Etats musulmans pour, selon lui, " écraser la tête de cette vipère " (la Russie). L'ironie veut que la presse occidentale ait pris fait et cause pour lui, l'érigeant en véritable héros national. Dans le même temps, des témoignages plus critiques étaient passés sous silence, tel que celui du journaliste britannique Anatol Lieven . Ce dernier faisait observer que le président tchétchène se comportait comme une parodie occidentale d'un dictateur du tiers-monde, une sorte de " sous-Kadhafi ". Il ajoutait qu'en interviewant Doudaëv il avait eu l'impression que celui-ci ne jouissait pas de toutes ses facultés mentales. Une opinion partagée par deux diplomates occidentaux de l'OSCE qui l'avaient rencontré en 1995.

L'extrémisme de Doudaëv n'était que le reflet du climat politique qui régnait à cette époque au sein de la société tchétchène. En prenant leur indépendance, les Tchétchènes avaient cru pouvoir s'affranchir des règles de droit élémentaires. Cet aspect des choses échappait aux observateurs occidentaux qui, en décembre 1994, découvrirent le problème au travers des souffrances de civils tchétchènes pris au piège dans les ruines de Grozny, bombardée par l'armée russe. La presse internationale évoqua amplement le sort des réfugiés tchétchènes chassés par les combats. Mais elle ne dit pas un mot sur le départ forcé, dès 1991, de centaines de milliers de personnes : des Tchétchènes, mais aussi des Russes, des Tatars, des Ingouches et des Juifs qui fuyaient les exactions du régime en laissant tous leurs biens sur place.

Une nouvelle vague d'antisémitisme a déferlé sur la Tchétchénie à partir de 1997. Le parti nationaliste Nokhtchi a ainsi vu le jour en mai 1998. Son président, Chirvani Pachaëv, a déclaré qu'il percevait la croix gammée comme le symbole du " sang pur ". Selon lui, il est impossible de consolider l'islam chez les Tchétchènes sans renforcer " leur santé génétique ".



L'industrie de la prise d'otages



Les brutalités commises à l'égard des minorités ethniques n'ont pas été les seules formes de violence. A partir de 1996, le rapt et la traite d'otages devint une industrie lucrative pour une partie de la population tchétchène. En juillet 1996, le Britannique Michael Penrose, qui travaillait pour l'ONG française Action contre la faim, fut enlevé par un groupe armé . En décembre de la même année, six employés, dont cinq femmes, de la Croix-Rouge Internationale furent sauvagement assassinés au cours d'un raid nocturne. Cette tragédie provoqua de nombreux remous en Occident. En juillet 1997, un couple britannique, John James et Camille Carr, membres d'une ONG, fut enlevé à son tour. Venus à Grozny pour aider les enfants victimes de la guerre, ils ont été détenus pendant quatorze mois. Après sa libération, Camille Carr raconta qu'elle avait été violée pendant plusieurs mois par un ravisseur masqué.

Début octobre 1998, trois ingénieurs en télécommunications britanniques (Peter Kennedy, Darren Hickey et Rudi Petschi) et un Néo-Zélandais (Stanley Shaw) furent enlevés et décapités. Les images de leurs corps mutilés firent le tour du monde, choquant profondément l'opinion publique occidentale.

Ces événements tragiques accélérèrent la radicalisation des islamistes tchétchènes. A présent, la guerre a franchi un nouveau degré de violence qui tente de trouver sa légitimité dans l'islam.



La dérive islamiste



L'islamisme radical qui anime aujourd'hui la résistance tchétchène est très différent de la radicalisation nationaliste de 1991. La Russie n'est plus présentée dans le discours indépendantiste comme un Empire mais comme une " puissance infidèle ". La lutte que le peuple tchétchène mène contre les Russes n'est plus une guerre de libération nationale (donc progressiste aux yeux de l'intelligentsia occidentale) mais un djihad. L'objectif des indépendantistes ne consiste plus à créer une Tchétchénie démocratique mais à mettre en place un Etat théocratique (Imamat), phase initiale de la construction du Califat.



Une évolution logique



Il s'agit d'une évolution logique compte tenu de la présence relativement ancienne des islamistes en Russie. Les premiers apparaissent en URSS à la fin des années 1970 au lendemain de la révolution iranienne. En 1990, ils créent le Parti de la renaissance islamique, basé essentiellement au Daghestan et au Tadjikistan. Les islamistes commencent à se radicaliser après la guerre du Golfe, qui est considérée comme une agression impérialiste contre un peuple musulman. Ils établissent ensuite des contacts étroits avec les pétromonarchies qui subventionnent la construction de mosquées, notamment en Tchétchénie et au Daghestan. Entre 1990 et 1996, le nombre de lieux de culte a été multiplié par quarante. Des prédicateurs saoudiens et des vétérans arabes de la guerre d'Afghanistan - dont le célèbre compagnon de Ben Laden, le Jordanien Khattab, venu rejoindre les rangs de la guérilla tchétchène en 1995 - ont canalisé l'énergie de cette renaissance islamique. Khattab n'a pas tardé à devenir un intermédiaire incontournable entre Al-Qaïda et la petite république indépendantiste. C'est à travers lui que le réseau islamiste mondial finançait la faction la plus radicale de la résistance tchétchène.

Dès 1995, ces néo-fondamentalistes musulmans (connus en Russie sous le nom de " wahhabites "winking smiley exercent une forte influence sur les Tchétchènes. La Tchétchénie s'est " wahhabisée " en un temps record, de 1997 à 1999. Déjà, en 1996, le président tchétchène par intérim, Zelimkhan Yandarbiev, avait remplacé le code pénal soviétique par la charia. Elu président en 1997, Aslan Maskhadov a d'abord toléré le fonctionnement parallèle des tribunaux chariatiques, puis, en février 1999, les a officialisés.

En août 1999, cette " wahhabisation " a atteint son point culminant lorsque le chef de guerre tchétchène Chamil Bassaëv a tenté de créer un vaste Etat islamiste en annexant le Daghestan à la Tchétchénie. L'incursion a été repoussée ; les " wahhabites " daghestanais ont été chassés ; leurs communautés ont été interdites. La plupart ont trouvé refuge dans les régions russes voisines (Kalmoukie, Tchétchénie, Territoire de Stavropol). Mais le " wahhabisme " n'a pas disparu pour autant. Rejeté dans la clandestinité, il est en train d'évoluer vers une nouvelle forme, encore plus violente, de fondamentalisme islamique.



Contre la démocratie et l'Occident



Les journalistes occidentaux évitent le plus souvent d'attirer l'attention sur le fait que les Tchétchènes sont, avec les Daghestanais, les musulmans les plus fervents de la Fédération de Russie .

Il est d'ailleurs intéressant de voir comment les indépendantistes s'approprient l'islam pour mobiliser leurs troupes. On sait que l'un de leurs idéologues les plus radicaux, Zelimkhan Yandarbiev, est devenu porte-parole du djihad tchétchène. Il parcourt le monde musulman en quête de fonds pour la cause indépendantiste. Rappelons seulement que ce tribun chauvin et xénophobe a été, entre 1992 et 1997, successivement vice-président et président par intérim de la Tchétchénie. En raison de ses fonctions officielles, il passait en Occident pour un " modéré ". En 1999-2000, Yandarbiev représentait son gouvernement à l'étranger, entretenant ainsi des liens étroits avec les pays islamiques, en particulier les monarchies du Golfe. Il a, entre autres, été l'artisan de la reconnaissance de la Tchétchénie par les Talibans le 23 janvier 2000.

Yandarbiev a déclaré que la Tchétchénie de Maskhadov se trouvait en première ligne du djihad, au même titre que l'Afghanistan. C'est pour cette raison, explique-t-il, que ces deux pays se trouvent isolés sur la scène internationale. Par la suite, il a condamné la passivité et l'indulgence du président George Bush, " chef d'un pays chrétien et sioniste " et qui, de ce fait, ne peut être favorable ni à l'indépendance des Tchétchènes ni à leur guerre sainte. En mettant dans le même panier Vladimir Poutine, George Bush, l'ONU et l'OSCE, l'idéologue du djihad accuse ce " syndicat chrétien et sioniste international criminel " d'être responsable du génocide commis contre son peuple.

Il affiche un nationalisme extrême, révélateur du haut degré d'intolérance des indépendantistes, qu'on présente pourtant en Occident comme des " combattants de la liberté ". Les Russes, écrit Yandarbiev, ne sont que de " viles créatures " que l'on doit traiter avec répugnance. Pour lui, la haine raciale constitue " l'arme la plus puissante " de la lutte tchétchène, plus efficace que l'arme nucléaire.

Ses idées anti-occidentales, Yandarbiev les a également développées dans ses livres : Djihad et problèmes du monde actuel, publié en 2000, et Quel Califat ?, paru en 2002. Le site Internet islamiste www.kavkaz.org propose par ailleurs un manuel de djihad très " didactique ". L'idéologue islamiste y rejette l'idée même de démocratie. Selon lui, celle-ci est impossible chez les musulmans, puisqu'elle n'est rien d'autre qu'" une lugubre mutation du christianisme, qui impose [aux musulmans] les standards occidentaux de pensée et de mode de vie, tout en ignorant la religion et les lois du Seigneur ".

Autre exemple d'extrémisme islamique : celui d'un ancien ministre du président Maskhadov, Movladi Oudougov. Il est connu pour être le fondateur d'un parti islamiste " Nation de l'islam ", inspiré du mouvement afro-américain ultraradical et raciste " Nation of Islam " de Louis Farrakhan. A son sujet, une géopoliticienne française, Béatrice Giblin, écrit : " Cet homme d'origine jamaïcaine (...) est un musulman sexiste et antisémite, qui a qualifié le judaïsme de religion de caniveau et les Juifs de buveurs de sang ". En février 1998, Farrakhan s'est rendu au Daghestan pour soutenir un candidat aux élections municipales. En marge de la visite, planifiée par l'un des proches d'Oudougov, a été créée une structure islamiste transcontinentale - le Congrès des nations de l'islam - qui réunit les organisations tchétchène, daghestanaise et américaine.



L'inéluctable séparation



En Russie, les partisans de la méthode forte s'opposent à ceux qui croient encore en un règlement politique. Alors que la presse russe souligne que seule une aide économique massive à la Tchétchénie pourrait permettre d'étouffer les tentations séparatistes, la majorité de l'establishment politico-militaire rejette violemment toute solution négociée en réclamant comme seule issue une reddition sans condition.

Les médias russes affirment que le mouvement indépendantiste ne doit sa survie qu'au soutien financier des Saoudiens et au soutien moral des Occidentaux. La thèse du complot, qui viserait à démembrer la Russie, fait toujours recette chez la plupart des Russes. Ces nouvelles "forces du mal" (Tchétchènes et " wahhabites "winking smiley sont considérées par l'opinion publique comme les principaux agents subversifs lancé à l'assaut de la nation. Fidèles à l'idée d'un Etat fort et traumatisés par l'implosion du monde soviétique, les citoyens russes ne veulent pas entendre parler de sécession territoriale.



La carte " pro-russe "



Dans ce contexte difficile, Vladimir Poutine a tenté de se ménager un appui local en jouant des contradictions entre les deux formes d'islamisme présentes en Tchétchénie : le " wahhabisme " et le soufisme. Ce dernier a été présenté comme un islam modéré et traditionnel aux antipodes de l'islamisme violent et d'origine étrangère des " wahhabites ". Moscou a donc joué la carte des clans soufis de l'ancien mufti tchétchène, Ahmad Kadyrov. Kadyrov est passé avec armes et bagages du côté des Russes avant d'être nommé par Poutine chef provisoire de l'administration tchétchène le 12 juin 2000. C'est lui qui, en novembre 1999, avait rendu la ville de Goudermès sans combattre.

Mais cette alliance contre nature n'est qu'un pis-aller car, dans le Caucase, le soufisme a toujours été une idéologie radicale. Il a servi de base doctrinale au djihad lancé à deux reprises par les Tchétchènes et les Daghestanais (en 1816-1859 et en 1918-1919) contre les Russes. Quant à Akhmad Kadyrov, il a décrété, en 1995, un " troisième djihad " auquel il a pris part en personne jusqu'en 1996.

Il est clair que les islamistes soufis ont utilisé les Russes pour déloger les " wahhabites " qui, à l'époque Maskhadov, dominaient la vie politique tchétchène. Mais leur engagement " pro-russe " ne saurait être que provisoire. Comme les " wahhabites ", les soufis tchétchènes veulent introduire la charia dans leur pays. Comme eux, ils souhaitent la séparation, la seule différence étant qu'ils préfèrent l'obtenir progressivement, par le biais d'un règlement politique qui permettrait d'épargner les vies humaines. Contrairement aux indépendantistes qui se battent pour la création d'un " Etat islamique ", les " pro-russes " cherchent à construire une " société islamique " dans le cadre de la Russie. Mais cela revient au même : à terme, la Tchétchénie sera islamisée. En fait, les authentiques Tchétchènes "pro-russes" ont déjà quitté la république pour s'installer dans les grandes villes russes. Le départ des ces populations européanisées rend le maintien de la Tchétchénie à l'intérieur de la Russie de plus en plus problématique.



Vers un retrait de l'armée russe ?



Au-delà du conflit tchétchène, c'est tout le problème de l'" intégration " de la communauté musulmane de Russie, forte d'une dizaine de millions d'individus, dans le système démocratique russe qui se pose. Pour le moment, semble-t-il, la société post-soviétique n'est pas prête à modifier son identité profonde pour accorder une place aux musulmans. C'est pourquoi, se sentant rejetée, la communauté islamique se tourne de plus en plus vers le Sud, où l'attire l'énergie " révolutionnaire " du monde musulman.

Dans ces conditions, la solution dite " démocratique ", prônée énergiquement par nombre d'intellectuels occidentaux, semble de moins en moins envisageable. Après sept ans d'" indépendance " et deux guerres particulièrement meurtrières, la Tchétchénie a perdu plus de la moitié de sa population. Or on sait que sans le retour des réfugiés, tchétchènes et russes, qui ont fui la république en 1991-2001, tout processus électoral est voué à l'échec. Aucun des scrutins organisés depuis 1991 - y compris les élections de Doudaëv et de Maskhadov - ne peut être considéré comme véritablement démocratique. D'ailleurs, ils se sont déroulés dans un climat de violence tel que les opposants n'ont même pas eu la possibilité de s'exprimer.

Pour sa part, Vladimir Poutine, se sent désormais les mains libres. Malgré un lourd bilan en vies humaines, il est sorti renforcé de la prise d'otages d'octobre dernier. L'opinion publique russe l'a suivi. Côté tchétchène, le soutien moral apporté par Maskhadov aux terroristes a fait voler en éclats son image de " modéré ". Pour la première fois, les Etats-Unis ont exclu le président tchétchène et son entourage de futures négociations russo-tchétchènes. Les leaders russes n'hésitent plus à poser l'équation " Maskhadov = Ben Laden ", dressant un parallèle entre l'Afghanistan des Talibans et le régime établi par Maskhadov en Tchétchénie entre 1997 et 1999.

Pourtant, une partie de l'élite politique russe s'oppose à la rhétorique belliciste et jusqu'au-boutiste de Poutine et de ses généraux. Evgueni Primakov, Rouslan Khasboulatov et Ivan Rybkine proposent, chacun, une solution politique au conflit tchétchène. Le plan de Khasboulatov, par exemple, prévoit d'octroyer à la république une large autonomie dans la gestion des affaires intérieures et extérieures. La Tchétchénie ne ferait plus partie de la Fédération de Russie, mais la législation russe continuerait de s'y appliquer. La monnaie resterait le rouble et l'armée fédérale y serait toujours présente.

Dans l'état actuel des choses, Moscou aurait effectivement intérêt à se désengager de ce bourbier. D'autant que, après l'exode des Russes et des autres minorités, l'armée n'y remplit plus aucune mission de protection. Paradoxalement, les initiatives de l'administration russe s'orientent vers une telle issue. Les militaires sont actuellement en train de former des " forces armées " tchétchènes " pro-russes " appelées à combattre les indépendantistes et à se substituer progressivement aux troupes fédérales, probablement courant 2003, replongeant ainsi la Tchétchénie dans une nouvelle guerre de clans.

Faute d'alternative praticable, la seule solution qui devrait s'imposer, à terme, est l'abandon volontaire par la Russie de la Tchétchénie. Pendant la période transitoire, la république nord-caucasienne pourrait obtenir de la CEI un statut particulier d'" Etat associé " doté d'une frontière étanche. Dans un deuxième temps, les Tchétchènes qui souhaitent vivre en Tchétchénie pourront déterminer eux-mêmes le régime politique qui leur convient. Si les conditions d'un référendum ne sont pas réunies, ils pourront confier ce choix à leurs responsables traditionnels.

Cette séparation ne risque-t-elle pas de créer des vocations sécessionnistes en chaîne, notamment de la part des Daghestanais et des Tatars ? Un tel scénario est peu probable car, dans la meilleure des hypothèses, la Tchétchénie deviendra une réplique de ce Moyen-Orient dont elle se rapproche de plus en plus à travers ses structures claniques et son islam militant. Un petit pays accablé de tous les maux propres à cette aire géocivilisationnelle : économie rentière fondée sur le pillage des richesses par une élite corrompue, autoritarisme, pouvoir théocratique, baisse du niveau de vie, tiers-mondisation, émigration, etc. Une Tchétchénie indépendante aurait tout du repoussoir.

A l'heure actuelle, un désengagement unilatéral serait certainement perçu comme une lâcheté par les généraux russes les plus radicaux et comme une capitulation par l'équipe de Poutine. Il serait, en tout cas, préférable à une réédition des accords de Khassavyourt qui, en 1996, n'avaient pas permis de mettre un terme définitif aux affrontements. Au bout du compte, l'intransigeance ne mène à rien : arc-boutée sur son refus de négocier, la Russie apparaît comme piégée dans un champ de mines où elle se serait laissé enfermer.



pi n° 98 - hiver 2002-2003

 
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