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Abdelhafid Chraiet, 1er commissaire arabe en France
a
23 octobre 2006 15:41
LE MONDE | 23.10.06




Ne l'enfermez pas dans son enfance. Ne lui demandez pas de broder au sujet des murs délabrés du "petit pavillon de m-erde" dans lequel sa famille s'était installée, à son arrivée en France, au début des années 1980, en provenance de Tunisie. Ne l'interrogez pas sur la responsabilité qui pèserait sur ses épaules, simplement parce qu'il est l'un des deux rescapés de la première classe préparatoire de l'école des commissaires, inaugurée en janvier à Saint-Cyr-au-Mont-d'Or, près de Lyon.



Abdelhafidh Chraiet, 24 ans, a la puissance des ambitieux et de l'appétit pour dix. Mais il n'est pas dupe du rôle qu'on veut lui faire jouer, à l'heure de la discrimination positive et des discours vertueux sur la diversité. Début septembre, il a fait sa rentrée au sein de la 58e promotion des élèves commissaires. "Je suis le seul Arabe. Il y a aussi une Noire et une métisse tellement claire qu'elle a l'air espagnole." L'an passé, la 57e avait une coloration unique, celle des "Français de souche". "Cela dit, vous connaissez beaucoup de Rachid qui sont inspecteurs des finances ?", lance-t-il avec défi.

La diversité dans la police semble inversement proportionnelle aux grades : les échelons blanchissent en montant. Le ministère de l'intérieur a donc décidé d'aider une quinzaine de jeunes gens issus de milieux défavorisés à préparer le concours de commissaire, un des plus ardus de la fonction publique. Les treize candidats de la première promotion ont essuyé les plâtres. "Je n'ai fait que bosser, quitte à sauter des repas, de 8 heures le matin à tard dans la nuit, se souvient Abdelhafidh. Je carburais à coups de 8-9 cafés et 2-3 comprimés de vitamine C par jour."

Alors que la date des écrits approchait, Jean-François Saillard, commissaire divisionnaire à la retraite chargé de l'encadrement pédagogique, demanda au jeune homme s'il connaissait l'histoire du Chêne et du Roseau, qui plie mais ne rompt pas. "Vous êtes tellement roseau, monsieur Chraiet !" Le policier évoque son étudiant avec émotion. "J'ai vite vu sa volonté peu commune d'apprendre et de réussir, dit-il. Il avait la souplesse du roseau, la volonté de répondre aux attentes du jury, d'adopter les codes culturels, clés de son intégration."

Le 11 juillet, Abdelhafidh s'est couché tard, vers 5 heures du matin, incapable de décrocher de la deuxième saison de la série Desperate Housewifes. Il a été réveillé par un appel téléphonique lui enjoignant de se présenter à une visite médicale. Une façon peu solennelle d'apprendre qu'il était reçu. Sonné, Abdelhafidh est allé annoncer la nouvelle à sa mère, très émue.

Sa mère, Safia, est son pilier. D'autant plus essentielle que le père a manqué à tous ses devoirs, devine-t-on à travers ses ellipses. Elle a fait du droit et du journalisme en Tunisie, avant de s'installer en France comme agent consulaire. Après avoir survécu à un grave accident de voiture qui ne l'a pas laissée indemne, elle a consacré sa vie à l'éducation de ses fils, Chiheb - titulaire d'un DESS d'intelligence économique - et Abdelhafidh. Ce dernier vante le courage et la volonté de sa mère. "Elle a le coeur sur la main, dit-il. Mais c'est une main de fer dans un gant de velours." Safia, elle, loue chez son fils "un charisme extraordinaire, avec un petit côté autoritaire. Il saura commander des hommes".

Le succès des deux garçons n'était pas écrit. A Herblay, dans le Val-d'Oise, Abdelhafidh ne brille guère à l'école, traîne le soir dans les rues, seul ou mal accompagné, fait "quelques c-onneries". "Je ne compte pas les milliards d'heures de colle et les insultes aux profs, sourit-il. Mais ne l'écrivez pas, j'aurais l'air de quoi ?" Il rate sa 3e ; on veut l'orienter vers un BEP menuiserie. "C'était ça ou rien. J'ai décidé que ça ne serait rien et j'ai redoublé."

Heureuse inspiration. Au lycée, avant même la terminale, l'adolescent découvre la philosophie, en particulier " (son) ami Jean-Paul Sartre". Son intérêt pour les affaires du monde se confirme. Depuis tout petit, il a pris l'habitude de regarder le "20 heures", de décrypter les publicités avec sa mère, de parcourir les articles du Nouvel Observateur et du Monde. "Intellectuellement, mon fils n'a jamais été défavorisé", résume Safia.

Après le bac, Abdelhafidh passe une licence de droit à l'université de Cergy-Pontoise. Son projet est de devenir avocat, tant qu'à faire au barreau de New York. Il passe une maîtrise de droit à Montpellier, puis un DEA de propriété intellectuelle. Le secteur paraît porteur, mais le souvenir de ses CV refusés en raison de la consonance étrangère de son nom le pousse à assurer ses arrières.

Rapidement, l'idée de devenir policier s'ancre en lui. Pendant sa maîtrise, il suit une formation à l'Institut de criminologie. Puis il entend parler de la création d'une classe préparatoire pour le concours de commissaire. Son dossier est retenu. Au même moment, en novembre, un cycle de violences urbaines sans précédent enflamme les banlieues. Abdelhafidh comprend les frustrations de ses copains, les pieds pris dans le béton, mais désespère des "c-onnards" qui harcèlent les policiers et les pompiers.

Nicolas Sarkozy lui inspire aussi un sentiment ambivalent. Comment ne pas lui être reconnaissant de l'accent mis sur la discrimination positive, de la création de la classe préparatoire, de sa présence à Saint-Cyr ? Mais certains mots guerriers, comme "racaille", l'ont heurté. "Ça ne va pas faciliter le dialogue social et le travail des policiers, dit-il avec prudence. Et ce n'est pas parce que les gens trouvent que le mot convient qu'il faut les encourager." Quand il croise des "amis en galère qui bossent au McDo" à Herblay ou à Argenteuil, le jeune homme leur cache qu'il sera commissaire, histoire de "ne pas se la péter". Grande gueule pudique dans un grand corps sportif. Officiellement, donc, il fait du droit. Et nourrit une ambition, fort de ses connaissances linguistiques : intégrer un service de renseignement, RG ou DST.

En attendant de se fondre dans l'anonymat de l'antiterrorisme, Abdelhafidh Chraiet réclame le "droit à l'indifférence" et ne se fait guère d'illusions sur sa médiatisation ponctuelle. "Rien à voir avec Harry Roselmack au "20 heures" de TF1, sourit-il. Moi, c'est sans doute la dernière fois. Quand le lecteur du Monde lira cet article, il se dira : "Tiens, un Arabe commissaire." Puis il oubliera mon nom en refermant le journal."



Piotr Smolar
a
23 octobre 2006 20:59
c une bonne chose qu'il y ait des arabes un peu partout
"L'orgueil du savoir est pire que l'ignorance"
a
23 octobre 2006 21:04
Citation
rifton75 a écrit:
c une bonne chose qu'il y ait des arabes un peu partout

Je pense aussi que c'est un bon moyen de faire évoluer les mentalités.
O
23 octobre 2006 22:41
Mais bien sur qu il fallait qu il fasse ceci depuis belle lurette !

exemple :

Les policiers du quartier de chinatown a nyc ou LA ont beaucoup d asiatiques dans leurs rangs , meme chose pour les policiers hispaniques qui patrouillent les quartiers chauds hispaniques , au moins il n y aura pas d'incomprehension linguistique !

C est evident que c'est une bonne chose a faire .
a
23 octobre 2006 23:09
Obs2006, je ne le vois pas sous cet angle qui me paraît être un peu communautariste !
Je préfère avoir des policiers arabes qui côtoient aussi les beaux quartiers, bref qui sont au service de tous les citoyens, et pas uniquement de leurs semblables.
H
31 octobre 2006 18:29
c'est pas le premier commissaire arabe , y en a eu d autres dans le passé , vérifiez vos infos .
a
1 novembre 2006 11:04
Citation
Hamza a écrit:
c'est pas le premier commissaire arabe , y en a eu d autres dans le passé , vérifiez vos infos .

Tu peux peut-être nous aider à vérifier nos infos.
L
1 novembre 2006 11:46
effectivement j'en ai vu dans des films grinning smiley

non non, c'est fort possible,dans ma boite, il y a bien toutes les origines à tous les échelons, moins en haut de l'échelle, mais le niveau prépa et au delà est moins courant en provenance des classes pauvres en général
h
1 novembre 2006 21:05
vous connaissez beaucoup de Rachid qui sont inspecteurs des finances ?", lance-t-il avec défi.



Ma question pourrait paraître bête, mais j'ai pas compris ce qu'il voulait dire par Rachid, pourquoi ne pas dire tout simplement maghrebins?? Ce prénom est-il le plus répandu en France??


Entre l'ombre et la lumière, il ya les mots
Entre l'ombre et la lumière, il ya les mots.
a
1 novembre 2006 21:38
Il ya même eu un député Musulman dans le temps et qui a siegé avec sa djellaba et ceci en France.
T
2 novembre 2006 14:14
je ne suis vraiment pas certain qu'il soit le premier mais alors vraiment pas du tout
T
2 novembre 2006 15:36
je suis d'autant moins certain qu'à Montmorency ou à Enghien les bains (95), en 2001, un des commissaires était arabe au joli prénom de Nadir

et pour le fun, parce que ça fait plaisir de démonter ces titres ronflants :

le point

Sans rancune, le monde

Et parce que je suis sympa, je ne dirai pas qu'en 2003, le Monde diplomatique évoquait déjà ce cas
H
2 novembre 2006 18:33
J'en connais personnellement un qui est commissaire et ses parents sont des algériens .

Donc ils sont au moins deux grinning smiley CQFD
a
2 novembre 2006 19:51
Autant pour moi messieurs Hamza et Toros Daglari smiling smiley

Au fait, le titre d'origine n'est pas celui-ci.
L'ancien parlait du premier candidat arabe à intégrer une promotion de futurs commissaires.
Comme le titre était trop long, je l'ai rétréci pour faire court.
Les autres commissaires arabes ont peut-être gravis les échelons par voie interne.

Donc, je m'excuse pour ce titre, qui pour le coup est tout à fait inapprorié.
T
2 novembre 2006 22:59
Il n'y a pas de mal Andy
 
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