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Hirak : Le torchon brûle entre Mountada Al Karama et le ministère de l’Intérieur

Entre l’ONG de Hamieddine et le département de Laftit, le bras de fer entame déjà son quatrième épisode. A l'origine du clash, la réponse de Mountada Al Karama qui a jeté lundi la pierre au ministère de l’Intérieur après le communiqué de ce dernier sur l’ouverture d’une enquête autour des auteurs d'images de personnes «prétendument torturées par les forces de l'ordre à Al Hoceima». Détails.

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Abdelali Hamieddine, président de Mountana Al Karaba et le ministre de l'Intérieur, Abdelouafi Laftif. / Ph. DR
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Le bras de fer opposant le PJD et le ministère de l’Intérieur vient d’atteindre une nouvelle étape. Cette fois-ci, le torchon brûle entre le ministère dirigé par Abdelouafi Laftit et le Forum de la dignité pour les droits de l’homme, alias Mountada Al Karama, proche du parti d’Abdelilah Benkirane et dirigé par Abdelali Hamieddine. A l’origine de ce nouveau clash, l’ouverture d'une enquête pour identifier les auteurs d'images montrant des personnes «prétendument torturées par les forces de l'ordre à Al Hoceima».

Des images à l’origine du clash

Dimanche, un communiqué du ministère de l’Intérieur relayé par l’agence MAP informait que «des pages sur Facebook ont publié des images de personnes agressées lors d’actes criminels ainsi que d'autres documentant des incidents survenus au Moyen-Orient, tout en prétendant fallacieusement qu’il s’agit d’actes de violence et de tortures perpétrés par les forces de l’ordre dans la province d’Al Hoceima».

Pour le département d’Abdelouafi Laftit, il s’agit d’«allégations tendancieuses à même d’induire en erreur l’opinion publique et d’attiser le sentiment d’insécurité et de peur chez les citoyens».

«Les autorités compétentes ont procédé à l’ouverture d’une enquête en vue d’identifier les personnes impliquées dans la divulgation de ces mensonges et allégations pour engager les procédures légales qui s’imposent.»

La recrudescence des communiqués, une «violation flagrante de l’indépendance du parquet»

Le communiqué de l’Intérieur n’a pas été salué par tout le monde. Le lendemain, Mountada Al Karama s’est fendu d’un communiqué incendiaire. «Le Forum de la dignité suit avec une attention toute particulière et une grande préoccupation la recrudescence des communiqués diffusés par le ministère de l’Intérieur», indique l’ONG dirigée par le PJDiste Abdelali Hamieddine. L’association estime que les communiqués de presse du ministère de l’Intérieur constituent une «violation flagrante de l’indépendance du parquet qui fait partie du pouvoir judiciaire, réputé indépendant du pouvoir exécutif en général et de l’autorité du ministre de l’Intérieur en particulier».

«Ces multiples communiqués du ministre de l’Intérieur concernant l’ouverture d’investigations judiciaires selon le bon vouloir du ministre constituent des infractions au code pénal, et reflètent une volonté d’imposer progressivement une tutelle de facto sur le travail des magistrats du parquet dans les différents tribunaux, qui sont les seuls habilités à faire des déclarations publiques à propos de l’avancement de leurs investigations judiciaires.»

Et d’ajouter que le ministre de l’Intérieur «essaie d’orienter l’action (du parquet, ndlr) de manière absurde et stupide».

Une ONG des droits de l’homme «entravant la liberté d’expression» ?

Depuis lundi, les deux parties semblent avoir abandonné les sorties officielles, se contentant de répondre par médias interposés à leurs déclarations mutuelles. Lundi, une source au sein du ministère de l’Intérieur a pointé du doigt les «lectures erronées et les fausses interprétations» de l’ONG dirigée par Hamieddine. Tout en évoquant, lors d’une déclaration accordée à Hespress, «le manque de lecture précise du vocabulaire et des finalités du dernier communiqué», le responsable a aussi souligné les excès de langage et le vocabulaire «dangereux» contenus dans le communiqué de l’ONG.

«Le communiqué a été publié par le ministère de l'Intérieur en tant que personne morale de l'ordre public et d’une institution assurant le maintien de la sécurité et la protection des citoyens. Il n’a été en aucun cas émis par le ministre à titre personnel», indique le responsable. Ce dernier ne manque pas non plus d’émettre plusieurs remarques sur les terminologies utilisées par l’association proche du PJD. Avant de conclure que la position de l’ONG est une «atteinte claire à la liberté d’expression».

Pour l’ONG, le ministère joue le bourreau et la victime

Une sortie médiatique qui n’échappera pas non plus à Mountada Al Karama. Sur le pas du ministère de l’Intérieur, une source anonyme de l’ONG a accordé mardi une déclaration à Lakome, se disant «surprise qu’une source qui se réclame du ministère de l’Intérieur évoque la liberté d’expression exercée par ce département».

«En tant que département de l’Etat, le ministère de l'Intérieur est appelé à réagir dans le cadre de ses prérogatives et sa juridiction conformément à la loi et aux textes réglementaires, et rien d'autre. Comment une source du ministère de l’Intérieur peut débattre de la liberté d'expression alors qu’un communiqué du même ministère vise à la restreindre ?», s’interroge-t-elle avant d’établir une comparaison du Maroc à la France. «En France, vous ne trouverez pas le ministère de l’Intérieur en train de s’adresser au public sur l’ouverture d’une enquête avant la publication d’une déclaration du parquet général compétent. Cela ferait scandale», conclut la même source.

De quoi entamer le quatrième épisode de ce feuilleton accéléré, qui risque encore d’impliquer d’autres parties.