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Mariage des mineures : Abdelilah Benkirane tancé sur sa vision des droits des enfants

Multipliant les sorties polémiques sur différents volets du Code de la famille, dans le contexte du débat sur la réforme du texte, Abdelilah Benkirane s’est attiré cette fois-ci les foudres d’une association des droits des enfants. Touche pas à mon enfant a interpellé le secrétaire général du PJD sur sa perception de la protection de l’enfance, à la lumière de ses réticences sur la criminalisation du mariage des petites filles.

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Abdelilah Benkirane
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Le secrétaire général du Parti de la justice et du développement (PJD), Abdelilah Benkirane, a été épinglé par l’association Touche pas à mon enfant, qui a dénoncé les récentes déclarations du numéro un de la formation islamiste concernant son opposition à l’interdiction et à la criminalisation du mariage des mineures. Remise en avant dans le contexte du débat en cours sur la réforme du Code de la famille, la question a été abordée par diverses institutions et organisations de la société civile, qui ont préconisé l’abrogation de l’article 20 autorisant encore cette mesure par dérogation du juge. Dans un communiqué, l’ONG présidée par Najat Anwar a dénoncé, ce vendredi, le soutien affiché de l’ancien chef du gouvernement au «mariage des mineures à partir de quinze ans».

Dans ce sens, Touche pas à mon enfant s’est indignée de «la position erronée» de Benkirane, compte tenu des «tragédies» que cette forme de mariage provoque chez les enfants, en plein développement personnel. L’organisation a ajouté que les dispositions religieuses auxquelles Abdelilah Benkirane fait référence pour justifier ses réticences sont flexibles et «s’adaptent à chaque époque et lieu», grâce aux mécanismes jurisprudentiels et théologiques comme l’ijtihad et l’analogie.

En l’espèce, épouser une mineure à notre époque actuelle est «une sentence de mort» de son avenir, insiste Touche pas à mon enfant.

Une condamnation à mort pour l’avenir des enfants

Dans sa déclaration écrite, l’ONG indique que le secrétaire général du PJD gagnerait à se pencher «sur la situation des victimes» de ce mariage, «notamment dans les zones rurales», ainsi que sur le poids de ce phénomène «sur toute la société». Touche pas à mon enfant a par ailleurs réaffirmé sa position, considérant depuis toujours le mariage des enfants comme «un crime contre [ces derniers], une agression sexuelle sous couvert de la loi» et une pratique «qui doit être criminalisée et stoppée».

Dans ce sens, l’organisation a appellé à éviter l’exploitation politique des questions de la protection de l’enfance. Elle prône «un débat national impliquant toutes les parties civiles, des droits de l’Homme, politiques, académiques et religieuses, en respectant les opinions de chacune, dans le but de protéger l’enfance marocaine».

A la suite d’une demande de consultation formulée par le Parlement marocain concernant le mariage des mineures, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a rendu un avis dans le même sens. En février dernier, l’institution a publié un document à ce sujet, en mettant l’accent sur les dimensions socioéconomiques et celles de droit que revêt l’abrogation nécessaire de cette mesure. Outre le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant qui reste opaque dans cette forme de mariage, le CESE a analysé le phénomène à la lumière des indicateurs du développement humain, ainsi que les Objectifs du développement durable (ODD) 2030.

Dans une étude menée avec le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) au Maroc, le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a précédemment conclu sur la nécessité d’abroger l’article 20 du Code de la famille, qui permet encore le mariage des enfants. Dans des déclarations antérieures, le ministre de la Justice s’est également interrogé sur l’intérêt de maintenir le statu quo autour de la question.

Dans un entretien donné à la chaîne saoudienne d’information Al Arabiya, en juillet 2023, Abdellatif Ouahbi a insisté que «l’âge légal du mariage est de 18 ans, pour les filles et les garçons, car c’est l’âge de la majorité». Par ailleurs, le ministre a souligné qu’à ce sujet, «les enfants n’ont pas de devoirs mais des droits» et qu’à partir de là, «la place des filles de moins de 18 ans est à l’école».