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Étude sur l’islamophobie en Grande-Bretagne, entre sentiment «anti-islam» et «anti-musulman»

Dans une nouvelle étude sur les religions, le maitre de conférence Stephen H. Jones, spécialisé dans l’étude de l’islam et des musulmans en Grande-Bretagne à l’Université de Birmingham, démontre l’étendu des préjugés contre l’islam dans la société britannique «même chez ceux qui sont tolérants des autres minorités». Retour sur cette étude qui témoigne que 25,9% des Britanniques ont une perception négative de l’islam et des musulmans, en faisant le deuxième groupe le moins apprécié dans le pays.

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Image d'illustration. / Tim Graham
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Malgré son étendu, l’islamophobie n’est toujours pas reconnue comme ce qu’elle est, «un préjugé religieux ou un phénomène comparable au racisme», estime Stephen H. Jones dans l’introduction du rapport «Les préjugés à table : L’islamophobie dans la Grande-Bretagne contemporaine», publié ce mercredi par l’Université de Birmingham. Malgré la présence du phénomène d’islamophobie et l’impact qu’il a sur plus de 3 millions de citoyens, soit la deuxième communauté religieuse du pays représentant environ 5% de la population, le débat public se limite, regrette l’auteur, à des questions de terminologie.

Dans ce rapport, le chercheur tente de montrer l’étendu de l’islamophobie contemporaine, dans ses différentes composantes, et «comment elle peut être comprise et combattue». Se référant aux préjugés des autres groupes ethniques et religieux, des conclusions peuvent être faites sur l’étendue du phénomène et sa nature. Alors, l’islamophobie témoigne en réalité de deux phénomènes qui existent «en tandem» : le premier s’apparentant à une forme de racisme, décrit comme «anti-musulman», et l’autre à un préjugé anti-religieux, décrit comme «anti-islam».

Les préjugés «anti-islam» en Grande-Bretagne

Ainsi, une partie des préjugés se concentrent sur le phénomène religieux. Les résultats de l’étude démontrent d’une par une certaine défiance envers la religion de la population sondée, d’autre part une méfiance disproportionnée envers l’islam. Sur le phénomène religieux dans son ensemble, 71,4% des sondés estiment que «la religion apporte plus de conflit que de paix dans le monde» et 64,6% que «les personnes ayant des croyances religieuses très fortes sont souvent trop intolérantes envers les autres».

Cependant, 64% des sondés pensent que l’islam ou les musulmans dans le monde ont un impact plus négatif sur la société que les autres groupes religieux, à savoir 18% pour le catholicisme et 1% pour le judaïsme. Pour l’«islamisme extrême», il n’est crédité que par 4% des sondés.

Si 47,2% des musulmans s’accordent à dire que «la vérité spirituelle du Coran est plus importante que son exactitude factuelle», contre 18,51% en désaccord, 38,8% des Britanniques pensent que le Coran doit être pris «littéralement mot pour mot», contre seulement 15,7% «symboliquement, en prenant en compte le contexte historique et la signification poétique». Pour la Bible, les sondés sont 41,2% à penser que la symbolique l’emporte sur la lettre (21,3%).

L’islamophobie comme sentiment «anti-musulman»

L’étude permet aussi de démontrer que les musulmans sont victimes de stigmatisation et de préjugés en tant qu’individus. Il ressort que 25,9% des sondés ont une «attitude négative» envers les musulmans, dont 9,9% «très négative», en faisant la communauté la plus mal vue après les «gitans ou gens du voyage irlandais» (44,6%), pour d’autres raisons historiques. À titre de comparaison, la minorité juive est source de sentiments négatifs pour 8,5% des sondés. Pour la perception positive, elle reflète la même stigmatisation, les musulmans étant bien perçus par 23,5% de la population, derrière 13,7% pour les gens du voyage.

Le sentiment anti-musulman se ressent aussi indéniablement dans les thèses décrites comme «conspirationnistes» avec 23,7% des individus qui pensent que les musulmans sont responsables de l’islamophobie, contre 6% pour les juifs et l’antisémitisme. Aussi, 26,5% des sondés croient qu’il existe en Grande-Bretagne des «zones où la charia est appliquée et où des non-musulmans ne peuvent pas entrer», alors que pour 36,3%, l’islam serait «une menace pour le mode de vie britannique» et que les musulmans n’ont pas eu d’impact positif sur la société britannique depuis leur arrivée (19,7%).

En conséquence, l’auteur estime notamment qu’il est nécessaire que les figures politiques du pays reconnaissent le problème de l’islamophobie en Grande-Bretagne et prennent des mesures pour combattre le phénomène, alors que la société civile doit reconnaître le manque d’éducation de la société sur l’islam et œuvrer pour y remédier, afin que les stéréotypes cessent d'influencer la perception des musulmans.