Menu

angle_2

Maroc : Campagne de lutte contre le froid à l'ère du coronavirus

A l'épreuve du froid hivernal dans les régions enclavées du Royaume, s'ajoute cette année la pandémie du covid-19. Cette situation exceptionnelle a occasionné de grandes difficultés pour les associations apportant de l'aide aux populations touchées.

Publié
Photo d'illustration. / DR
Temps de lecture: 3'

Depuis quelques jours, les comités provinciaux de vigilance et de suivi des risques de la vague de froid dans plusieurs provinces du royaume organisent des réunions pour étudier les mesures proactives devant être adoptées. C’est le cas notamment à Sefrou, Zagora, El Hajeb et Ouarzazate, etc., tandis que les autorités locales dans d’autres provinces ont déjà commencé à intensifier leurs interventions, pour lutter contre l’isolement de certains villages par la neige et venir en aide à la population.

Cette mobilisation est souvent accompagnée par des actions caritatives organisées par des ONG locales et nationales. Le début de la saison hivernale est ainsi précédé par des campagnes de collectes de vêtements chauds, de couvertures et de denrées alimentaires, qui seront par la suite distribués, en collaboration avec les autorités locales.

Cette année cependant, la vague de froid intervient en pleine pandémie du coronavirus, ayant poussé les autorités à adopter un ensemble de mesures pour endiguer sa propagation. Un contexte particuliers qui limite les actions des ONG et devrait impacter les actions sur le terrain.

Des opérations freinées par des craintes d’une propagation de la Covid-19

«Contrairement aux années précédentes, notre association ne procédera pas cette année à la collecte et la distribution de vêtements, car nous ne savons pas s’ils ont été touchés par le virus ou pas», nous explique Salwa Zine, présidente de l’association El Baraka Angels. «D’habitudes, nous emmenons des vêtements chauds mais nous ne le ferons pas cette année et nous nous contenterons d’amener des vêtements chauds neufs pour les écoliers. Pas de vêtements de deuxième main à cause de la pandémie», tranche-t-elle.

L’associative précise toutefois que la caravane d’hiver, qui se déplacera à Azilal, la région de Khénifra et celle de Midelt, sera maintenue, après une collecte de denrées alimentaires. Elle connaîtra ainsi la distribution de paniers et des couvertures neuves.

«Nous avons opté pour cette solution pour ne pas avoir quelque chose à nous reprocher. En général, nous distribuons 3 à 4 tonnes de vêtements. Nous ne pouvons pas tout stocker pour trier et nous ne pouvons pas être sûrs que tout a été désinfecté.»

Salwa Zine, El Baraka Angel

La présidente de l’association El Baraka Angels explique aussi que la crise sanitaire a impacté les activités de l’association. «Comme nous ne pouvions pas nous déplacer, nous avons cette année envoyé les valeurs des paniers sous forme de mandats d’argent aux bénéficiaires», détaille-t-elle. L’ONG a également préféré mettre des paniers à la disposition des autorités locales pour leur distribution.

Le spectre de la pandémie plane aussi sur certaines actions associatives à Ouarzazate. Contacté par Yabiladi ce mercredi, Driss Elourgui, qui fait partie d’un collectif de bénévoles, ne cache pas ses craintes. «Nous avons ainsi lancé un appel aux dons pour collecter des vêtements chauds au profit des douars de la région. Mais nous ne savons pas encore quelle procédure devrons-nous adopter pour désinfecter et distribuer en toute sécurité», déclare-t-il. «Nous voulons avant tout aider sans pour autant mettre la vie des volontaires et des populations ciblées en danger», insiste-t-il encore.

Une vigilance accrue pour aider sans mettre en danger

La situation épidémiologique n’empêche pas d’autres ONG de maintenir leur campagne hivernale de distribution de vêtements et de denrées. A Mirleft, l’association Imal 2050 est l’une d’elle. «Nous avons décidé de maintenir la collecte et la distribution de vêtements chauds, avec quelques changements», nous déclare Elmahdy Arouche, l’un de ses membres.

Il explique que l’association demande d’abord aux donateurs de «laver les vêtements avant de les déposer», tandis que l’ONG compte procéder à «un deuxième lavage puis tri et stockage avant de distribuer». «Nous comptons aussi collaborer avec les autorités locales pour qu’elles nous assistent quant à la distribution des vêtements aux habitants des douars situés à Mirleft et impactés par la vague de froid», ajoute-t-il.

Pour sa part, l’association Al Ofoq pour les actions sociales et culturelles et le développement humain indique qu’elle élargira sa cible cette année. «Nous visons une région par an, depuis quatre ans. Cette année, avec la crise et ses impacts, nous avons décidé de cibler trois régions : Tazart, dans la province d'Al Haouz, Ait Oumdiss près de Demnate ainsi que Zaouiat Ahansal, dans la province d’Azilal. Au total, 14 douars seront ciblés», déclare son président, Boubker Bennani.  

Cette année aussi, des mesures exceptionnelles sont prises par cette ONG. «Nous avons demandé aux donateurs de bien laver les vêtements avant de les mettre dans des sachets fermés», ajoute-t-il. «Nous stockons ces sachets car d’après les études scientifiques, le virus peut survivre sur les surfaces et les vêtements au maximum 9 jours. Ainsi, la collecte sera arrêtée 10 jours avant la distribution. Nous avons aussi commandé des désinfectants pour les amener avec nous», précise l'associatif.

De plus, avec une autre ONG locale, l’association compte désinfecter les vêtements à nouveau sur place et ne procéder à leur distribution «qu’après trois jours» pour s’assurer qu’ils ne constitueront pas un facteur d’infection. «La pandémie a eu un effet positif sur nos campagnes depuis son début, car les gens font de plus en plus preuve solidarité avec les familles nécessiteuses et celles des régions reculées», conclut-il avec une note d'espoir.